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Interview de Lyonel Trouillot

Une rare et très intéressante interview de l'écrivain haïtien Lyonel Trouillot, à propos de son dernier livre, Veilleuse du Calvaire, de l'art d'écrire en général, de la révolte, et de ses maîtres Jacques Stephen Alexis et René Philoctète, a été diffusée récemment sur France Culture.

  • Écoutez l'entretien ici

Accédez aux livres de Lyonel Trouillot en salle H de la bibliothèque nationale de France, dans les collections de littérature francophone.

Tanella Boni, Prix francophone international du Festival de la poésie de Montréal

Lors de la soirée « Briller vrai » du 31 mai, événement du Festival de la poésie de Montréal, l'écrivaine ivoirienne Tanella Boni a remporté le Prix francophone international 2023. Elle a été récompensée pour son dernier recueil Insoutenable frontière, très bientôt disponible en salle H de la bibliothèque nationale de France.

Tanella Boni est aussi philosophe. Elle a enseigné à l'université d'Abidjan et a publié plusieurs ouvrages importants de la pensée africaine contemporaine, dont le dernier, Habiter, selon Tanella Boni, porte sur la création des liens, dans une société des migrations ; non loin de la Sagesse des lianes, de Dénètem Touam Bona, qui propose une "cosmopoétique" du vivant.

Tanella Boni est enfin romancière, prix Ahmadou-Kourouma 2005 pour Matins de couvre-feu.

Hommage à Milan Kundera (1929-2023)

L’écrivain franco-tchèque Milan Kundera, né le 1er avril 1929 à Brno, est mort le 11 juillet dernier à Paris.

« La plupart des êtres s’adonnent au mirage d’une double croyance : ils croient à la pérennité de la mémoire (des hommes, des choses, des actes, des nations) et à la possibilité de réparer (des actes, des erreurs, des péchés, des torts). L’une est aussi fausse que l’autre. La vérité se situe juste à l’opposé : tout sera oublié et rien ne sera réparé. Le rôle de la réparation (et par la vengeance et par le pardon) sera tenu par l’oubli. Personne ne réparera les torts commis, mais tous les torts seront oubliés. » (Le livre du rire et de l'oubli)

Ce ton irrévérencieux envers toute forme d'institution de l'être (politique, religieux, moral, sentimental) est celui de Milan Kundera. Et c'est l’un des paradoxes de sa renommée d'incarner l'écrivain des bouleversements historiques du XXe siècle (l’invasion nazie, le communisme, l’exil politique) quand son art consiste précisément à se déjouer de leur poids (« l’hypertrophie de l’âme » européenne, ainsi qu’il caractérise son époque dans divers essais). 

Après une période d’intense activité poétique, portée par l'idéal révolutionnaire – il adhère au Parti communiste à dix-neuf ans, juste avant le « Coup de Prague » de 1948 –, Kundera abandonne ce qu’il nomme la « tentation lyrique » pour l’art du roman, c’est-à-dire « la pratique d'un regard lucide et désabusé » (Les Testaments trahis). Il opte pour la mise en scène comique du drame historique. La plaisanterie, son premier roman, publié en 1967, raconte l'emprisonnement d'un étudiant à cause d'un canular. Le livre est un succès, mais lui fait perdre son poste d'enseignant à l'Académie du cinéma de Prague. 

De plus en plus surveillé par la police, il décide en 1975 d’émigrer en France, où ses romans, traduits et publiés chez Gallimard, bénéficient déjà d’une certaine renommée (il obtient ainsi le prix Médicis étranger en 1973 pour La vie est ailleurs). Il enseigne la littérature comparée à Rennes, puis Paris. 

En 1979, Le livre du rire et de l’oubli, où il raconte notamment son exclusion du Parti communiste, lui vaut d'être déchu de sa nationalité par la Tchécoslovaquie. Pour autant Kundera ne s’identifie pas à une cause politique :

« La police détruit la vie privée dans les pays communistes, les journalistes la menacent dans les pays démocratiques. » (cité par Ariane Chemin dans A la recherche de Milan Kundera)

Que ce soit du côté de l'idéologie ou du libéralisme, de la propagande ou de la publicité, il rencontre les feux faces d’une même « imagologie » (L'immortalité), qui capture les désirs des individus et les dépossède de leur rapport à soi. Les personnages de Kundera sont la plupart du temps inquiets, flottants, naviguant parmi des simulacres (y compris et en premier lieu celui de l’amour). Il fait ainsi partie des premiers romanciers à écrire le destin sentimental des individus à l’intérieur d’une société du spectacle.

La fiction pour Kundera est une science de l’image, et chaque scène concrète l'occasion d'une démonstration de « mathématique existentielle », où il fait jouer, avec une précision quasi cinématographique, la description immémoriale d’une attitude ou d’un geste, contre la fabrique éphémère des idées et des sentiments.

Après une période de gloire, qui culmine à la publication de son roman L'insoutenable légèreté de l'être (1984) et à son adaptation au cinéma par Philip Kaufman, Kundera cesse les apparitions médiatiques et choisit de laisser parler son œuvre. 

Pendant quatre ans, il réécrit avec François Kérel les traductions françaises de ses romans, tout en mettant la dernière main à l’un de ses essais majeurs, L’art du roman (1986), qu’il a rédigé directement en français. L’immortalité, son dernier roman « polyphonique » (1990), est écrit en tchèque et simultanément à destination de son traducteur français. A partir de La lenteur, (1993), Kundera n’écrit plus qu’en langue française. Il cherche alors exclusivement « le bonheur rare qu’illumine l’humour », tout en continuant à développer ses perspectives critiques sur l’art (Le rideau, Une rencontre). 

Milan Kundera se revendique d'un art expérimental qui fait retour à la liberté romanesque d'avant le XIXe siècle, dépourvu de « l'illusion du réel ». Il intègre la réflexion essayistique à l'art du roman, comme Broch et Musil, en faisant intervenir le narrateur, double de l'écrivain, et en multipliant les points de vue ; enfin il donne libre cours à la « fantaisie de la digression », comme Rabelais. Il explique avoir cherché les valeurs poétiques de la modernité (l'intensité, la densité, le merveilleux) dans un « territoire romanesque désenchanté » (Les testaments trahis, 1993). Celui qui a adapté Jacques le fataliste pour le théâtre (Jacques et son maître, 1998), s’est pensé – sans l’optimisme du XVIIIe siècle – comme un écrivain des Lumières

L’intégralité de son œuvre est éditée selon ses vœux, c'est-à-dire sans annotation ni appareil critique, en Pléiade, en 2011. 

En 2012, il a reçu le prix de la Bibliothèque nationale de France

En 2020, Milan Kundera a légué ses archives et sa bibliothèque personnelle à la deuxième plus grande bibliothèque de République tchèque, la bibliothèque de Moravie à Brno.

La Bibliothèque nationale de France rend désormais hommage à l’écrivain par une exposition de ses livres dans les salles G et H de la Bibliothèque tous publics (site François-Mitterrand).

Quelques liens pour approfondir :